Quelques réflexions à l’attention de M. Manuel Valls et de Mme Christiane Taubira

Vivant en société, nous avons tous des obligations les uns envers les autres, obligations dont les plus importantes sont éternelles et universelles. Ces obligations peuvent se résumer au respect total de l’autre, dans son intégrité physique et morale.

La transgression de ces obligations mérite un châtiment plus ou moins important selon la gravité de la faute ou du crime.

Par sa faute ou son crime, une personne s’exclut de la société et le châtiment qui lui est infligé confirme cette exclusion.

Ce ne sera donc qu’après un temps de purification qu’elle pourra être réintégré dans cette société dont elle s’est elle-même exclue.

Comme l’écrivait la philosophe Simone Weil : « De même que la seule manière de témoigner du respect à celui qui souffre de la faim est de lui donner à manger, de même le seul moyen de témoigner du respect à celui qui s’est mis hors la loi est de le réintégrer dans la loi en le soumettant au châtiment qu’elle prescrit. » (L’enraciment).

La privation de liberté d’un fautif ou d’un criminel doit lui permettre de se purifier et doit constituer en même temps une sorte dédommagement pour les torts qu’il a commis et pour la victime qu’il a touchée. Elle doit enfin avoir un effet dissuasif.

Malheureusement, il apparaît clairement aujourd’hui que nos prisons françaises ne constituent pas un juste châtiment et ne permettent pas une véritable expiation.

Surpeuplées, elles sont trop souvent une école du crime et de la récidive. D’autre part il est évident que de nombreux détenus souffrent de troubles psychiatriques, sont déséquilibrés, que leur place serait dans un centre spécialisé pour des soins, et non pas dans le surpeuplement et la promiscuité de nos prisons qui accentuent encore leur déséquilibre.

Il faut que le châtiment s’accompagne d’un sentiment de justice. Or trop souvent la justice est bafouée, et l’échelle des peines est injuste.

Il est injuste en effet que des personnes de milieux favorisés, des personnes privilégiées par leur condition sociale, des personnes haut placées dans la société, des notables, qui devraient donner l’exemple de l’honnêteté et de la droiture, puissent faire de graves malversations, détourner des fonds, par exemple, en quasi-impunité, tandis que des personnes qui n’ont reçu aucune éducation, qui ont été élevées dans la rue, sont systématiquement punies.

Oh, je le sais : l’injustice dont on a été victime, ne justifie pas l’injustice que l’on cause. Nous avons tous une conscience du Bien et du mal, cependant cette conscience peut-être faussée par le manque d’éducation.

Le rôle de la Justice et de la prison devrait précisément être de réveiller cette conscience et d’élever vers le Bien ceux qui sont sur la pente du mal.

Encore conviendrait-il pour cela que les magistrats, la police, et tous ceux qui ont pour mission de faire respecter les lois, soient irréprochables. Tel n’est pas le cas malheureusement.

Encore faudrait-il que la condamnation du fautif ou du criminel soit rendue avec une certaine solennité, un certain cérémonial qui montre la gravité de la faute ou du crime, et que la souffrance occasionnée par la privation de liberté s’accompagne d’un sentiment de justice.

Toutes ces conditions ne sont malheureusement pas respectées actuellement et ne permettent de rétablir l’ordre dont toute société a besoin.

La première condition serait donc le respect de la loi et l’irréprochabilité de tous les notables et de tous les agents de la Justice.

Il conviendrait enfin que nos prisons, sans être des clubs méd., soient des lieux décents, dans lesquels les détenus puissent se purifier de leurs fautes ou de leurs crimes et se reconstruire.

Le Destin, les gènes et l’Amour…

Certains pensent que nous sommes programmés génétiquement, que notre Destin est inscrit dans nos gènes, et que le criminel naît génétiquement criminel.

Je m’insurge contre un tel mensonge et une telle stupidité qui poussent à désespérer de l’homme.

Je le dis haut et fort : nous sommes les artisans de notre Destin. Un fils d’alcoolique ou de truand, ne deviendra pas fatalement alcoolique ou truand.

Certes, nous sommes conditionnés par nos toutes premières années. Nous ne choisissons ni la date, ni le lieu de notre naissance. Ni notre milieu familial. Ni le passé de notre famille. Ni notre éducation. Ni notre religion ou notre absence de religion.

Voilà tout un tas d’éléments qui pourraient nous faire croire que notre Destin est tracé d’avance.

Il n’en est rien.

Il est des enfants qui naissent dans le meilleur environnement et qui tournent mal. Comme il en d’autres qui ont un lourd passif à leur naissance, et qui deviennent des hommes exemplaires.

Tout dépend en fait de l’Amour reçu et de l’Amour donné.

Il n’y a pas de secret, le petit de l’homme – qu’il soit petit ou adulte – a besoin d’aimer et d’être aimé. Sans l’Amour, il n’est rien.

Certains entendent repérer les futurs délinquants en classes maternelle ou primaire. Où va-t-on ?…

Un enfant peut-être turbulent, instable, très difficile à cinq ans, et devenir le meilleur des hommes adulte.

Notre avenir dépend pour beaucoup de nos rencontres, bonnes ou mauvaises.

De mauvaises rencontres feront basculer le destin d’un jeune dont la vie avait tout au départ pour être droite.

Pareillement, des êtres partis sur une mauvaise pente, ayant sombré dans la délinquance voire le crime, feront une rencontre qui illuminera leur vie et les remettra sur le bon chemin.

Aussi, je refuse de désespérer de l’homme. Tant que sa dernière heure n’a pas sonné, il peut faire mentir tous ces fatalistes qui veulent l’enfermer dans un carcan génétique sans issue.

Oui, l’homme est libre. Oui, l’homme bâtit son Destin et le pire malheur qui puisse lui arriver est de s’imaginer qu’il ne sera jamais aimé.

Si les hommes voulaient bien être honnêtes, ils reconnaîtraient qu’il n’y a pas de Hasard. Chacun – quels que soient ses handicaps au départ dans la vie – a au moins une fois dans sa vie – et souvent beaucoup plus – une chance, une petite chance de faire basculer en bien son Destin. Il est libre de saisir ou non cette chance. Tout est là.

La prostitution, un moindre mal ?…

Très idéaliste, j’ai toujours pensé que l’acte d’amour ne devrait pas se passer d’un sentiment d’amour. Je sais pourtant que la réalité est souvent différente, et que beaucoup recherchent avant tout, dans l’acte d’amour, le plaisir physique et se passent de tout sentiment.

Il en est ainsi depuis la nuit des temps, et les prostitués – hommes ou femmes – permettent à certains de soulager les pulsions physiques qu’ils ne peuvent soulager ailleurs.

Aussi, je trouve bien mal venu ce projet de lois de certains députés, de frapper d’une amende de 3.000 euros et d’une peine de six mois de prison, les clients des prostitués.

C’est plonger dans la clandestinité complète la prostitution, avec tous les risques sanitaires qui s’en suivent ; c’est donner plus de pouvoirs aux proxénètes – qu’il faudrait impérativement, eux, frapper dur et fort – ; et c’est risquer de voir les viols se multiplier.

Quand on sait la moralité d’un certain nombre de nos hommes politiques qui n’hésitent pas à recourir à prostitution de luxe – et quand on sait les « escort-girls » qui accompagnent tous les sommets internationaux – on est surpris par l’hypocrisie d’un tel projet de loi.

Là encore, il y aurait deux poids, deux mesures. D’un côté les riches qui pourraient satisfaire librement leurs fantasmes. De l’autre, les pauvres qui seraient obligés de se cacher et risqueraient de lourdes sanctions.

Nos députés moralistes prennent la Suède en exemple. Je ne suis pas certain que ce soit un bon modèle. Les prostitués de ce pays s’expatrient dans les pays voisins, Norvège, Danemark, ou se cachent et voient leur insécurité physique et sanitaire grandir. Des proxénètes amènent des mineures de Russie qui sont des proies faciles.

La prostitution est un mal, sans doute, un mal vieux comme le monde. Un mal qu’on n’a jamais réussi à éradiquer. Mais peut-être un moindre mal…

Elle naît de la misère des hommes. De la misère sociale. De la misère économique. De la misère morale. D’une dramatique solitude, et aussi, chez certains ou certaines, de l’appât du gain facile. Si l’on peut appeler « gain facile » le gain obtenu en faisant commerce de son corps… Elle naît peut-être surtout d’une carence d’éducation…

Plutôt que de sanctionner les clients des prostitués, ne faudrait-il pas mieux rouvrir les maisons closes ? Là, les prostitués seraient peut-être plus sécurisés, seraient suivis sanitairement… Je pose la question, mais je sais que la chose est très complexe et que le remède – la réouverture des maisons closes – risque d’être pire que le mal – la prostitution clandestine.

A l’heure où l’on parle tant de débats – qui souvent n’accouchent que de souris ! – ne serait-il pas bon de réunir une table ronde entre des représentants de toutes les parties : les prostitués, les clients, les responsables de la santé, des affaires sanitaires et sociales, de l’Education, de la police, etc.

Et surtout, il conviendrait plus que jamais, de faire la chasse aux proxénètes qui s’enrichissent du commerce abject d’êtres humains.

Et enfin, il faudrait apprendre dans nos collèges et dans nos lycées, le respect de l’autre. La beauté de l’Amour partagé. Non seulement physique mais aussi enrichi de sa dimension spirituelle.