Japon : la seule question qui vaille…

Idéogramme d’Eternité, en japonais

Il aura suffi d’une simple chiquenaude – à l’échelle de la Terre – pour mettre à bas la troisième économie mondiale et le pays le plus à la pointe de la technologie.

Ce drame nous rappelle brutalement que nous sommes mortels, que nos civilisations sont mortelles, et nous invite à réfléchir sur le sens de la vie.

Personnellement, je suis émerveillé par le miracle de la vie et de l’Univers. Je resterais des nuits entières à contempler un ciel étoilé…

Mais comme beaucoup – comme tous ? – je suis interpellé par le mystère de la souffrance. La souffrance de ces centaines de milliers de Japonais victimes d’un redoutable séisme, d’un gigantesque tsunami et d’une catastrophe nucléaire. C’est beaucoup pour un seul peuple !…

Une souffrance difficilement compatible avec un Dieu d’Amour…

Je demande à ceux qui croient au péché originel, quelle faute avaient donc commise toutes ces victimes innocentes pour être si cruellement éprouvées…

J’aime trop la Justice pour croire que des descendants puissent être condamnés à expier à jamais la faute d’un père lointain…

Les croyants accepteront cette injustice, étant portés par l’Espérance de la Vie éternelle et l’Espérance d’un Paradis merveilleux qui gommeront toutes souffrances de ce monde. Pour eux l’Eternité espérée donne sens à la vie d’ici-bas.

Mais qu’en est-il de ceux qui ne croient ni au Ciel, ni à l’Enfer, pour qui la vie commence et finit sur cette terre, et ne s’enracine dans aucune Espérance ?…

Nous avons là, la question qui se pose à l’humanité depuis des millénaires. Et trop souvent, pris par le tourbillon de la vie quotidienne et absorbés par nos soucis exclusivement matériels, nous passons à côté de l’essentiel. Nous naissons et mourons, nous traversons la vie, sans nous être demandés une seule fois : « D’où venons-nous ? Où allons-nous ? », questions cependant primordiales…

Il appartient à chacun de trouver sa réponse… Mais je voudrais dire que, croyants ou non croyants, nous sommes tous embarqués dans une aventure qui nous dépasse et qu’il n’y a qu’un seul chemin qui vaille : celui de la fraternité et du partage. Celui de la compassion et de l’Amour.

Le reste, la Vie après la vie, n’a que peu d’importance. Nous le découvrirons au soir de cette vie terrestre. S’il y a un Paradis, le croyant – et le non croyant, j’en suis sûr ! – qui auront essayé de mener une vie droite, y goûteront tous le bonheur éternel. Et, s’il n’y en a pas, nous serons tous plongés dans une nuit d’un long sommeil, sans rêves et sans réveil. Voilà tout. Et dans tous les cas nous et nos descendants serons d’autant plus fiers du bien que nous aurons accompli ici-bas, qu’il aura été totalement désintéressé et gratuit.

Acharnement thérapeutique et euthanasie…

Il est facile, quand on n’est pas concerné directement par un problème, d’avoir des opinions tranchées et sans appel. Ainsi en est-il de l’euthanasie dont le Sénat doit discuter à nouveau ce 25 janvier.

Le respect sacré que nous devons avoir pour la vie, pour toute vie, nous invite à condamner une telle pratique. Et d’ailleurs, l’euthanasie est un mal moderne, une rançon de la civilisation. Dans la Préhistoire, nos lointains ancêtres prenaient soin des membres handicapés de leur communauté. On a trouvé, voici quelques années, dans la grotte de Shanidar, au Turkestan, les vestiges de neuf néandertaliens. L’un d’eux, portait des marques de blessures graves. Seule la solidarité des hommes de son clan lui permit de survivre. Ces derniers auraient pu l’abandonner ou le tuer. Ils ne l’ont pas fait et nous donnent un bel exemple de solidarité à l’aube de l’humanité.

Le problème se pose, en fait, avec acuité depuis que la médecine peut reculer indéfiniment la mort, et la frontière entre acharnement thérapeutique et euthanasie est ténue.

Si une personne endure des souffrances physiques et morales qu’on ne peut adoucir, dont on sait que son mal est incurable et qu’elle ne vit que par des subterfuges artificiels, si cette personne a encore sa conscience et demande à mourir, ou si elle n’a plus sa conscience mais a manifesté la volonté de mourir quand elle serait dans un tel état, faut-il dans une telle situation tout faire pour la maintenir en vie ?…

La question est tragique et ne peut obtenir qu’une réponse collégiale : celle de l’équipe médicale qui la soigne (médecins et infirmières) et celle de la famille. Ce n’est qu’au terme d’un accord entre tous qu’on peut accepter – à mon avis –de mettre un arrêt à ce qui n’est qu’une survie. Mais, l’acte est grave et ne doit en aucun cas être banalisé.

Mais attention à ne pas tomber dans l’euthanasie de confort, à celle qui consiste à donner la mort parce que le malade devient une charge trop lourde pour les proches et pour la société, ou – le danger est réel – parce que les héritiers sont pressés de toucher l’héritage !…

La souffrance fait partie de la vie, il faut tout faire pour l’atténuer, mais savoir aussi l’accepter. La personne qui souffre, qui est profondément diminuée physiquement et intellectuellement, reste un personne humaine et a droit au respect de tous.

Et puis attention aussi – le danger est grand – aux dérives d’eugénisme. Les horreurs des nazis – qui supprimaient les handicapés, les homosexuels, ceux qu’ils appelaient les « sous-hommes » – doivent rester dans toutes les mémoires.

Pour résumer, la sagesse, je crois est de dire non à l’acharnement thérapeutique, dans des cas bien précis et bien cadrés, et non aussi à l’eugénisme. Que l’on soit croyant ou non, la Vie est quelque chose de sacré et son respect doit toujours primé, quelles que soient les peines, les souffrances qu’il nous impose.

L’euthanasie s’apparente au désespoir et jusqu’au bout une vie a du prix pour les autres. Et le problème de l’euthanasie est peut-être surtout celui de la souffrance. Une fois la souffrance supprimée, les demandeurs y renoncent la plupart du temps…

Et finalement, ce qui importe le plus, ce serait que le malade en fin de vie puisse être entouré par des proches ou des infirmières ayant du temps à lui consacrer – ce qui n’est hélas plus le cas dans nos hôpitaux qui ne sont maintenant que des entreprises n’ayant qu’un seul but, la rentabilité ! – et qu’il puisse choisir, quand sa vie n’est plus qu’un fil ténu, le moment de sa mort.

Quelle belle mort pour moi, que celle de cet oncle âgé de quatre-vingts ans, hospitalisé pour des problèmes cardiaques, veillé par son épouse et ses enfants, qui un soir ou un matin – je ne sais plus – dit simplement à son épouse : « C’est fini. » et s’est éteint sereinement au même moment. Il avait choisi lui-même, l’heure où retourner dans l’Eternité.

Je sais combien il est difficile de parler de tout cela sans passion, et une fois encore, je ne prétends pas détenir La Vérité. Il y a dans ce domaine que des cas particuliers qui doivent être examinés avec sagesse et humanité, mais aussi sans complaisance.