La tentation du désespoir…

Mon Dieu ! Mon Dieu !

Avez-vous abandonné le monde ? Ou les hommes vous ont-ils abandonné ?

Pendant des siècles et des siècles, l’humanité a connu bien des drames, bien des fléaux, mais quelle que soit leur gravité les hommes avaient confiance en vous. Ils étaient sûrs que dans le mystère de votre Eternité, vous veilliez sur eux. Ils avaient la certitude qu’au terme de cette vie terrestre, ceux d’entre eux qui avaient fait preuve de bonne volonté – et c’étaient le plus grand nombre -seraient sauvés.

Aujourd’hui – comme jadis – des guerres de plus en plus cruelles continuent à déchirer le monde. Guerres bien souvent nées de gouvernants atteints par la folie des grandeurs, qui n’aspirent qu’à agrandir leurs territoires, à dominer le monde, et qui n’ont que mépris pour la vie humaine. Ils sèment le sang et des larmes dans des peuples qui n’aspirent qu’à vivre et mourir en paix.

Il n’y a là – hélas ! – rien de bien nouveau si ce n’est que les scientifiques d’aujourd’hui ont jeté Dieu aux oubliettes et ont plongé l’humanité dans le désespoir !…

Comment croire encore en Dieu, quand les scientifiques nous assurent que la Vie, que notre vie, est le fruit d’une évolution sans fin née du hasard ?

Comment croire en Lui, quand la science nous affirme que l’Univers, notre planète, notre soleil, disparaîtront à jamais dans quelques milliards d’années ?

Que ces étoiles qui ont guidé les hommes pendant des millénaires et qui ont rempli d’espoir nos nuits sans lumière, comment croire qu’elles ne sont que les vestiges de boules de feu, disparues depuis des milliards d’années ?

La plupart des scientifiques s’appuient sur tout cela pour nier l’existence de Dieu et nous faire croire à l’absurdité de nos vies.

Cependant rien est aussi évident. Loin de là !

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On ne saurait parler de Dieu en faisant appel uniquement à la raison. La place de Dieu est avant tout dans le cœur de chacun de nous, un cœur qui doit être prêt à l’accueillir avec la plus grande humilité.

Quelle prétention chez l’homme, dans son insignifiance, de vouloir définir, circonscrire Dieu qui est infini ! Le génial Albert Einstein à qui l’on demandait s’il croyait à l’existence de Dieu, répondit avec sagesse : « Définissez-moi d’abord ce que vous entendez par Dieu et je vous dirai si j’y crois. »

Il faut savoir que si, en s’appuyant sur la science, beaucoup prétendent que Dieu n’existe pas – comme nous venons de le voir – un grand nombre de savants, faisant preuve d’humilité, l’intègrent aujourd’hui dans la création de l’Univers.

En effet, ce serait peut-être Dieu qui serait à l’origine de ce fameux big-bang voici 14 milliards d’année, sur lequel tous s’accordent. Il s’agit là qu’une force, d’une énergie, que faute de mieux nous appelons « Dieu », à la suite desquelles seraient né l’Univers, et seraient apparues la vie et son évolution jusqu’à nous.

Le tort de l’homme, c’est peut-être de s’être accordé trop d’importance dans l’Univers. C’est peut-être de s’être prétendu immortel dans un monde où tout passe. C’est d’avoir oublié que la vie ne peut se passer de la mort…

Mais que l’on soit croyant ou non, que la mort soit un terme sans appel ou non, que certains ici-bas connaissent d’innombrables et terribles épreuves, osons dire que la vie est une chance. Oui ! la vie est une chance ! Nous pouvons donner un sens à notre vie. Nous devons refuser le désespoir.

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 Quels que soient les malheurs, les souffrances, les drames dont sont victimes certains sur cette terre, chacun connait au moins une fois dans sa vie, une JOIE ! Une JOIE si petite soit-elle, qui pourra irradier son cœur d’un bonheur qui marquera sa mémoire !

Le but de la vie, n’est-il pas de partager nos peines et nos JOIES ? Oh ! inutile d’insister sur nos peines ! Chacun a les siennes. Pourquoi charger les autres des nôtres ? Cependant, sans s’appesantir sur les nôtres et en ayant conscience qu’il y en a beaucoup d’autres plus lourdes que les nôtres à porter, il n’est pas interdit de nous ouvrir à quelques proches des peines que nous portons. Non pas pour nous plaindre ou pour nous apitoyer sur nous-mêmes. Mais simplement pour nous alléger de leur poids quelques instants, comme l’on soulève le couvercle d’une marmite en ébullition.

Mais le plus important, c’est le partage des JOIES qui viennent ensoleiller nos vies. JOIES plus fortes que tout, et qui balaient nos moments de tristesse, de découragement ! Rien que ce partage est capable d’illuminer nos vies et de leur donner du sens.

Mais il y a plus. Comme cela a été dit plus haut, la vie est une chance. Chance de nous enrichir de toutes les découvertes qui ont été faites par les hommes depuis des millénaires. Chance de pouvoir les transmettre à nos descendants, après les avoir complétées.

Chance, émerveillement de découvrir les beautés infinies du monde ; beauté d’un lever ou d’un coucher soleil, beauté d’un site naturel ou d’édifices construits par les hommes ; beauté infinie de chefs-d’œuvre de la littérature, de la musique, de la peinture, etc.

Enfin, chance unique pour l’humanité, d’avoir eu, dans la profondeur de ses nuits, des guides capables de l’éclairer et qui ont eu des vies exemplaires. Le chemin qu’ils ont tracé a souvent été déformé, et a fréquemment donné naissance à des religions, à des sectes, intolérantes, dans lesquelles chacun prétend détenir La Vérité et veut l’imposer aux autres…

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Etant chrétien avec mes doutes, mes interrogations, et loin de partager tous les dogmes de l’Eglise, je pense que le message d’Amour et de Paix de Jésus, rapporté par les Evangiles, s’adresse à tous, est valables pour tous les temps, et est capable de donner pour toujours un sens à nos vies.

Comme l’a dit Jésus : « Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas. » (Marc 13,31 – Matthieu 24,35 – Luc 21,33).

Je crois que Jésus a réellement existé et qu’il est mort crucifié. Ce sont là des faits historiques indéniables. Comment d’ailleurs douter de son existence quand l’humanité compte les années à partir de sa naissance, parle des années avant et après Jésus-Christ ?…

Il est pour toujours un modèle pour tous. Il a invité à l’Amour, au respect des autres, à la fraternité, au pardon, valeurs universelles auxquelles mon cœur adhère sans la moindre hésitation. Si les hommes voulaient respecter son exemple et son message, le monde serait épargné par les guerres et toutes les violences.

Certes, l’Amour ne supprime les souffrances, mais il les rend plus supportables.

Il y a, bien sûr, le Mystère de la Résurrection au petit matin de Pâques. Chacun, bien sûr, au fond de son cœur, est libre de croire ou non en cette formidable Espérance incarnée dans ce Mystère.

Mais, Résurrection ou non, la vie peut être belle et chacun peut lui donner un sens.

Notons que, parmi les êtres vivants, les hommes sont les seuls à avoir une conscience du Bien et de Mal. A savoir organiser d’émouvantes cérémonies pour rendre hommage à leurs morts, ou pour honorer ou prier Dieu.

Ajoutons à ces réflexions, deux citations tirées de « L’œuvre au Noir » de Marguerite Yourcenar dans lesquelles je me retrouve totalement :

« Si nous nous trompions en postulant la toute-puissance de Dieu et en voyant dans nos maux l’effet de sa volonté ? Si c’était à nous d’obtenir que son règne arrive ? J’ai dit naguère que Dieu se délègue ; je vais plus loin, Sébastien. Peut-être n’est-il dans nos mains qu’une petite flamme qu’il dépend de nous d’alimenter et de ne pas laisser éteindre ; peut-être sommes-nous la pointe la plus avancée à laquelle il parvienne… »

« … Toutes ces opinions passaient pour offenser Dieu ; en fait, on leur reprochait surtout d’ébranler l’importance de l’homme. »

Cette chronique s’intitule « la tentation du désespoir ». Puisse le lecteur, après l’avoir lue, retrouver des raisons d’ESPERER et être convaincu que la vie vaut la peine d’être vécue !

Agnostique ?…

Voilà des années que je cherche un mot pour définir mes rapports à Dieu.

Elevé dans une famille profondément chrétienne, j’ai dû longtemps et durement cheminer pour me défaire des dogmes de la religion catholique – qui me semblent aujourd’hui totalement abracadabrantesques – et je ne puis donc plus me qualifier de « croyant ».

Me dirais-je pour autant « athée » ? Certainement pas. Il y a dans ce mot, un sectarisme, un rejet de la transcendance, une prétention souvent à détenir la Vérité, que je refuse.

J’ai longtemps travaillé sur le terme « agnostique ». Serais-je « agnostique » ? Non plus. Car pour l’agnostique, si je ne dis pas de bêtise, la question de l’existence ou non de Dieu ne se pose pas. Or, pour moi, cette question se pose. Et de façon cruciale ! Mais, nous n’aurons la réponse qu’au soir de cette vie.

Je ne suis donc ni croyant, ni athée, ni agnostique. Alors que suis-je ?…

Loin de rejeter l’héritage de mon enfance et de mon adolescence, et les traditions religieuses dans lesquelles ma famille a baigné pendant des siècles, je dirai simplement que je suis un chrétien de cœur.

C’est-à-dire, un chrétien qui ne croit plus en cette kyrielle de dogmes que l’Eglise a forgés pendant deux mille ans. Ou plus exactement un chrétien pour lequel ces dogmes n’ont aucune importance. N’ont rien d’essentiel.

Le péché originel, la conception de Jésus par l’Esprit Saint, la Virginité de Marie, et la Résurrection de Pâques, tout cela pour moi aujourd’hui est secondaire. J’ai grandi dans l’ignorance totale des choses de la vie, et leur découverte brutale à l’adolescence m’a plongé dans un désarroi dont je porte encore les séquelles. La procréation est déjà pour moi quelque chose d’extraordinaire, de fantastique, alors pourquoi en rajouter avec cette conception virginale du Christ ?

Enfin – il y a longtemps au Moyen-âge que j’aurais fini dans les flammes d’un bûcher ! – je n’ai pas besoin de voir un Dieu dans le Christ. Peut-être l’est-il. Peut-être ne l’est-il pas. C’est pour moi une question sans importance.

En tout cas, il incarne pour moi le parfait et véritable héros. Il a donné sa vie sans mettre en danger celle de celles et ceux qui l’ont suivi.

La beauté, la pureté des Evangiles. Le message de justice et de paix qu’ils contiennent. L’invitation à aimer nos frères en humanité. La plus belle prière qui soit au monde, le Notre Père, tout cela m’éblouit, me fascine. Comme je suis ébloui et fasciné par le miracle de l’Univers et de la Vie.

Je resterai des heures à contempler un ciel étoilé. Sans être scientifique, je me demande comment, infime poussière perdue dans l’espace et dans le temps, je pouvais être en germe dans cette minuscule tête d’épingle qui est apparue voici 14 milliard d’années, lors du Big-bang ?… N’est-ce pas merveilleux ? N’est pas fantastique ?…

J’admire. Je m’émerveille. Mais je ne tire aucune conclusion. Je dis simplement « Que sais-je ? » et je refuse les croyances sectaires et à l’emporte-pièce.

Je me définirais donc comme un chrétien des chemins de Galilée, d’avant l’Eglise et tous ses dogmes. Un chrétien de cœur, disais-je, pour lequel l’essentiel, est d’essayer de vivre le plus droitement et justement possible – avec mes limites, bien évidemment – en m’efforçant d’être généreux avec tous mes frères humains. Un chrétien persuadé qu’il n’y a qu’une seule et unique réponse à tous les problèmes de l’humanité, l’Amour.

Certes, l’Amour ne redonne pas leurs bras et leurs jambes à un manchot et à un cul-de-jatte. Mais, quel merveilleux réconfort pour eux de se savoir aimés et d’aimer en retour !

Je n’ai plus peur de l’Enfer. S’il y en a un, il est sur cette terre. Et quant au Paradis, s’il y en a un, je pense que nous nous y retrouverons tous dans la JOIE, au soir de cette vie, et je m’en réjouis. Voilà tout.