Assisté, hier soir, à une conférence de Jean-François Kahn, sur le thème : « Une autre société est-elle possible ? » Ce journaliste a montré, de façon remarquable et avec une grande clarté, les perversions de nos systèmes économiques et financiers actuels.
Voici un résumé, en quelques lignes, de ce qu’il a dit.
On pratique la politique du sapeur Camember des années 1900, qui consiste à faire des trous pour reboucher des trous ! On prête de l’argent que l’on n’a pas !…
Alors que les pays en difficulté auraient besoin de prêts à taux bas pour les aider à remonter la pente, on leur prête de l’argent à des taux exorbitants, ce qui les endette un peu plus.
Tout est côté en bourse et l’on arrive à cette absurdité : les actionnaires en viennet à souhaiter des catastrophes pour que leurs actions prennent de la valeur !…
Il y a maintenant deux économies. Une économie réelle qui s’appuie sur la production, sur des marchandises, sur des bien réels ; et une économie virtuelle qui brasse des sommes cinquante fois plus grandes que l’économie réelle et qui crée de l’argent sans s’appuyer sur des marchandises, sur des services, etc.
A propos de l’Europe, Jean-François Kahn regrette que l’on soit au milieu du gué. On a renoncé au souverainisme – politique qui peut se défendre – et l’on n’a pas d’Etats-Unis d’Europe. Pas de pouvoir politique, économique, ou financier communs. Pas de véritable politique étrangère commune. Pas d’interlocuteur précis à la tête de l’Europe.
Personnellement, je pense qu’il manque à l’Europe une langue commune, et je persiste à croire que les langues des 27 pays membres descendant presque toutes du latin, on aurait très bien pu prendre pour langue commune, un latin actualisé et simplifié. Les Israéliens l’ont bien fait avec l’hébreu qui était en somnolence depuis des siècles et qui est devenu langue officielle d’Israël. Je fais part de cette suggestion à Jean-François Kahn. Il l’écarte d’un revers de la main et la qualifie de totalement utopiste !…
A propos de la réintégration de la France dans le commandement de l’OTAN, cette décision nous enlève notre autonomie. Si la France avait fait partie de l’OTAN en 2003, elle aurait été obligée de participer à la guerre en Irak ! Nicolas Sarkozy souhaitait cette participation…
Mis à part la réforme des Universités, Nicolas Sarkozy n’a fait aucune grande réforme. Il demande des sacrifices, il rogne les avantages acquis depuis 1945. Cela ne s’appelle pas des réformes.
La situation financière et économique de la France, n’est pas plus brillante que celle de la Grèce, de l’Irlande, du Portugal ou de l’Espagne. Jusqu’à présent, la France inspire la confiance de ses créanciers, car depuis le Directoire, elle a toujours honoré ses dettes. Cela durera-t-il toujours ?…
Tel est le bilan du monde actuel dressé par Jean-François Kahn. Je partage à 100% son analyse, mais je regrette son absence de réponse au sujet de sa conférence : « Une autre société est-elle possible ? »
Plus exactement, il répond oui après voir montré pendant près de deux heures toutes les perversions des systèmes actuels, mais il laisse l’auditeur sur sa faim. Cette société est absurde. Nous en convenons tous. Mais comment la changer ? Aucune proposition et aucun exemple concrets ! Juste un « tout compte », « tout est possible ». Juste un rappel de Rosa Parks, cette femme noire aux USA, qui eut le courage, en 1955, de prendre et de garder, dans un bus, une place réservée aux Blancs, et qui est à l’origine de l’émancipation des Noirs et à qui l’on doit peut-être l’élection du premier Président noir à la tête des USA.
Oui, cette conférence, pour parler familièrement, s’est terminée en queue de poisson. S’il est possible de changer cette société pervertie nous n’avons eu aucune réponse concrète pour nous dire comment le faire !
Personnellement, je sais qu’il s’agit là d’une tâche immense et d’une complexité inimaginable. Les mécanismes sont tellement imbriqués les uns dans les autres et tellement interdépendants, que les remèdes qu’on peut apporter ici, risquent de provoquer un mal ailleurs.
Il faudrait à la tête des Etats, des grandes Banques, des grandes Entreprises, des hommes éclairés et de bonne volonté, soucieux du bien commun. Tel n’est pas toujours le cas, et les meilleurs sont vite écartés.
Reste alors, notre force de simple et petit citoyen. Je l’ai dit et je le répète, je crois au pouvoir et à la force de l’Amour et de la générosité. Ils peuvent beaucoup. Je crois en leur contagion. Et si nous ne pouvons changer le monde, nous pouvons le rendre plus fraternel, partageant les joies, et les peines de ceux qui nous entourent, en essayant par notre solidarité et avec la faiblesse de nos moyens, d’alléger le poids des jours des uns ou des autres. N’est-ce pas, finalement, le plus important ?…
Je ne crois pas aux ruptures brutales et aux révolutions violentes qui laissent souvent derrière elles des fleuves de sang, et qui font table rase de tout l’héritage passé, dans lequel pourtant, il y a toujours du bon à prendre…
Ou plutôt, je crois aux révolutions silencieuses. Comme dit le proverbe : « Quand un arbre tombe, on l’entend ; quand une forêt pousse, ça ne fait pas de bruit. » Je crois aux arbres qui poussent dans le silence !…
Je ne crois pas aux ponts qu’on détruit, mais je crois aux ponts qu’on ne se lasse pas de jeter sur les fleuves et les rivières qui nous entourent.