Déchristianisation des jours fériés…

le samedi 11 avril de l’An de Grâce 2015

Je vous salue avec respect, Monsieur Thomas Guénolé. J’ignorais jusqu’à ce jour votre nom et votre existence, mais je vois que vous êtes un éminent docteur en Sciences politiques, maître de conférences à l’Institut d’études politiques de Paris, chroniqueur politique au Plus du Nouvel Obs, conseiller politique indépendant, et j’en passe.

Bref, vous êtes une « pointure » devant laquelle, simple petit employé de banque en retraite, je m’incline humblement.

Permettez-moi cependant de vous interroger sur vos raisons à vouloir avec tant d’acharnement déchristianiser les jours fériés de notre calendrier.

Je viens en effet de découvrir votre plaidoyer. Sur huit jours fériés en France, six sont d’origine chrétienne : le lundi de Pâques, le jeudi de l’Ascension, le lundi de la Pentecôte, le jour de l’Assomption de la Vierge (15 août), le jour de la Toussaint (1er novembre) et Noël (25 décembre). Et à ces six-là, vous ajoutez la Saint-Pierre-Chanel à Wallis-et-Futuna et la Saint-Etienne en Alsace-Moselle.

Au nom de cette sacro-sainte laïcité à laquelle les socialistes, les agnostiques, les athées et les francs-maçons sont tant attachés, vous vous indignez des privilèges injustes accordés aux chrétiens qui bénéficient de ces fêtes religieuses, quand les juifs, les musulmans, les francs-maçons doivent poser un jour de congé s’ils veulent fêter Hanoucca, l’Aïd el Kébir, ou la Saint-Jean d’Été, etc.

Encore un coup de poignard lancé contre les chrétiens de France ! Vous niez la tradition chrétienne de la France, et faites appel à ses racines juives, musulmanes, athées, et remontez même à ses racines druidiques, à l’époque où nos ancêtres les Gaulois pratiquaient les sacrifices humains, et même à la période des Saturnales à Rome, Noël ayant remplacé cette antique fête qui marquait le solstice d’hiver.

A vous lire, je pense que vous devriez réclamer, au nom de la laïcité, la mise en place d’un nouveau calendrier, le nôtre étant éminemment chrétien, puisqu’il remonte à la naissance du Christ !…

Je vous propose donc de compter les années à partir de la Révolution française qui a jeté aux oubliettes tant de traditions, ou de mai 1968 où des anarchistes ont détruit, en bloc et en quelques semaines, tout un passé – dans lequel il y avait certes lieu de faire le ménage mais dans lequel il y avait un précieux et inestimable héritage -. C’est ce qu’on appelle familièrement jeter le bébé avec l’eau du bain ! Vous n’étiez pas né alors – je vois que vous êtes né en 1982 – mais je ne serais pas surpris que vous soyez le fils spirituel de cette révolution, si l’on peut parler d’un élément « spirituel » dans un courant exclusivement matérialiste qui nie toute transcendance.

Il est vrai que la France n’a pas toujours été chrétienne, et a connu – et connaît encore – d’autres courants religieux. Mais de grâce, ne privez pas ses habitants – croyants ou non croyants – de fêtes instaurées depuis des siècles et qui font partie – que vous le vouliez ou non – de notre patrimoine !

Vous rappelez que la France est éminemment, d’après sa constitution de 1946, une « République laïque ». Soit. Mais laïque ne veut pas dire qui interdit les religions. Cela veut dire qu’elle ne se réclame d’aucune religion, mais qu’elle les respecte toutes dans la mesure où elles ne troublent pas l’ordre public.

Le christianisme est implanté depuis des siècles en France. Il a droit, me semble-t-il, à conserver les fêtes qui ont été fixées par nos aînés et dont tous les citoyens profitent – quelles que soient leur religion, et qu’ils soient croyants ou non. Et, dans la mesure où les pratiquants d’autres religions que la religion chrétienne, ont tous la liberté de poser des jours de congés pour leurs fêtes particulières, je ne vois là pas la moindre trace de discrimination ou d’injustice.

Pour finir, je ne serais pas surpris que vous souteniez, le président du Conseil français du culte musulman, Dalil Boubakeur, quand il réclame le doublement du nombre des mosquées en France d’ici à deux ans, car je constate chez tous les gauchistes, dont vous faites sans doute partie, l’hostilité, voire la haine, les plus profondes contre les chrétiens, et la plus grande bienveillance pour les musulmans qui, si l’on n’y prend garde, auront complètement étouffé, dans quelques années, notre grande et belle civilisation judéo-chrétienne qui a tant apporté au monde.

Je vous salue.

PS : Vous verrez encore une insupportable allusion au christianisme dans cet An de « Grâce » 2015 noté au début de cette lettre ! Je vous rappelle cependant que cette mention aurait été portée dans les années qui suivirent l’An mil, les contemporains, persuadés que la fin du monde allait avoir lieu, considéraient que les années qui suivaient était des années de « grâce ».

Je ne suis pas Charlie ! La chasse aux sorcières !…

Je l’ai dit et je le répète : je condamne sans appel les attentats de la semaine dernière, et j’estime que la liberté d’expression et la Liberté tout court, doivent impérativement être respectées et défendues.

Cependant, je ne me suis pas joint aux foules qui ont manifesté, dimanche dernier, sous le slogan « Je suis Charlie » et je voudrais dire ici que – malgré ma condamnation sans réserve du terrorisme, malgré ma compassion envers toutes les victimes, quelles qu’elles soient, et tous leurs proches, malgré mon attachement à la Liberté et à la démocratie – « Je ne suis pas Charlie » et je m’indigne des reproches qui sont faits par les médias à tous ceux qui, comme moi, revendiquent cette singularité.

Je ne saurais en aucun cas m’apparenter à une équipe de nihilistes, qui ne croient en rien, qui ne respectent rien, qui crachent sur tout et sur tous !

Chacun est libre, certes, de pratiquer l’humour qu’il veut. Mais je ne partage pas l’humour de Charle Hebdo. Un humour qui ne construit rien. Que ne rapproche personne. Un humour corrosif qui blesse, détruit, anéantit.

Notre monde marche sur la tête. Pour beaucoup la vie n’a aucun sens. Aussi, je pense que le devoir de journalistes responsables – et le devoir de tous ceux qui ont une influence sur l’opinion générale – est – sinon de donner un sens à ce qui pour eux n’en a pas – du moins d’aider les hommes à aimer la vie, à y prendre goût.

Dans un monde de souffrance, dans la nuit qui est la nôtre, les journalistes responsables ont le devoir de donner des notes d’Espoir, de rendre plus supportable l’insupportable, de faire naître – ou renaître – des fleurs dans nos cœurs desséchés par une actualité morbide.

Or, que font les journalistes de Charlie hebdo sinon tirer tout azimut sur tout et sur tous. Sur la religion, sur l’armée, sur la police, sur le gouvernement, etc.

Pardonnez-moi, mais je ne pourrai avoir la moindre sympathie pour des personnes qui, en 1975, en guise de « Joyeux Noël » écrivaient : « Chiez dans les crèches. Achevez les handicapés. Fusillez les militaires. Etranglez les curés. Ecrabouillez les flics. Incendiez les banques. »

D’aucuns me diront qu’il s’agit là d’un humour du second degré. Pourquoi pas du troisième, du quatrième ou du cinquième degré, quant à faire ?… Au risque de me faire traiter de « bégueule » je dirai qu’il s’agit là d’un humour grossier et ordurier, et qui n’apporte rien de positif au monde.

Charlie Hebdo est l’héritier en droite ligne des lanceurs de pavés de mai 1968, qui ont brisé et balayé toutes les valeurs sur lesquelles s’était appuyée notre civilisation occidentale pendant deux mille ans.

A la place de ces valeurs ils ont laissé un vide sidéral, ou plutôt des cloaques immondes et nauséabonds, dans lesquels ils se repaissent et dont ils inondent le monde.

Je ne sais si la vie a un sens. Peut-être n’en a-t-elle pas… Mais je sais que nous pouvons – et que nous devons – lui donner un sens. Ce sont notre insigne grandeur et notre éminent honneur. Il est vrai que ce mot n’a plus guère de sens pour les descendants de mai 1968 !…

Jusqu’à mon dernier souffle, j’essaierai de redonner Courage et Espoir à mes frères de la terre qui souffrent. De leur apporter l’indicible et mystérieux réconfort de l’Amitié et de l’Amour.

Tel ne semble pas, malheureusement, le a but de Charlie Hebdo. Je lis que Wolinski disait à sa femme : « Quand je serai mort, tu jetteras mes cendres aux chiottes comme ça je pourrai voir ton cul ! » Une telle plaisanterie – outre sa grossièreté – montre le sens qu’accordait à la vie ce dessinateur adulé aujourd’hui par les médias !

Il était donc impossible pour moi de défiler pour un tel hebdomadaire. Et encore moins avec une foule inconstante qui encensait et glorifiait d’une même voix, les forces de l’ordre, après avoir conspué et traîné dans la boue, voici moins de trois mois, les gendarmes du barrage de Sivens.

Alors, je crie haut et fort : « NON ! JE NE SUIS PAS CHARLIE ! »

Comprenne qui voudra.

Et si la crise mondiale était aussi une crise spirituelle ?…

Le monde traverse la plus grave crise économique, financière, sociale, de l’Histoire. Nous le savons tous.

L’injustice du chômage frappe de plus en plus de familles, et personne ne se montre capable d’enrayer un mal qui semble inéluctable.

Chacun propose ses solutions mais, il faut bien le reconnaître, aucune n’est totalement satisfaisante.

La vérité, c’est que personne n’a de solution, et que chaque remède a des effets pervers parfois pires que le mal.

La vérité, c’est que le monde traverse peut-être la plus grande crise spirituelle de son histoire.

Pendant des siècles, le christianisme a été la colonne vertébrale du monde occidental. Or, Mai 68, a balayé un grand nombre de nos certitudes, et n’a rien mis à place. Il a démoli d’un revers de main et sans discernement ce que des siècles avaient construit et n’a rien rebâti.

Des ruines de Mai 68 sont sortis un monde du doute, de la désespérance. Un monde où la vie s’arrête au terme de notre séjour ici-bas et n’a plus aucun sens. Un monde où les valeurs de fidélité, de confiance, de sacrifice sont hélas rejetées par de plus en plus d’individus. Un monde où l’Honneur n’a plus sa place. Un monde où Religion se confond avec aliénation mentale. Un monde où les idéaux sont de plus en plus matériels. Un monde où l’individualisme est roi.

Or, on ne pourra résoudre cette terrible crise, sans un retour aux valeurs de la spiritualité.

Biens souvent – trop souvent – les religions sont cause de divisions et de guerres sans merci, alors qu’elles devraient rassembler.

Mais elles sont aussi porteuses de valeurs d’altruisme, de générosité, de solidarité, d’Amour et d’Espérance dont on ne peut se passer.

Je le sais, l’Amour ne redonne pas ses jambes à un cul-de-jatte, ou ses bras à un manchot. Il ne redonne pas sa famille à un orphelin dont les parents viennent d’être emportés par un un tsunami, ou un fils trop tôt disparu à ses parents brisés.

Mais l’Amour et l’Espérance sont les seuls capables de rendre plus supportables les épreuves dues de notre condition.

Comme l’a dit André Malraux, « le XXIe sera spirituel ou ne sera pas ». Le grand malheur actuellement c’est qu’on ne propose aux peuples que des aspirations matérielles qui jamais ne les combleront.

Quand un quart de l’humanité vit dans la misère totale et manque du strict nécessaire, notre devoir, bien sûr, est de l’aider à profiter des progrès matériels qui rendent moins lourd le poids des jours.

Mais les biens matériels appellent toujours d’autres biens matériels et ne sauraient combler une vie d’homme. A quoi sert d’allonger sans cesse la durée de la vie, si au moment de la quitter, on ne sait jamais interrogé sur son sens, sur sa finalité ?…

Tout cela pour dire que les remèdes proposés pour résoudre la crise que connaît le monde aujourd’hui, ne pourront se limiter à l’économique, au financier, au politique, etc., mais doivent impérativement donner leurs places aux valeurs spirituelles qui sont les marques évidentes et indispensables de notre humanité.