Mort de deux militaires français au Mali…

Deux militaires français viennent de trouver la mort au Mali. Leur véhicule blindé a sauté sur une mine.

Le soldat sait, en s’engageant, qu’il peut donner la mort et, en contrepartie, la recevoir. Redoutable privilège !…

Emmanuel Macron et Florence Parly, la ministre des armées, ont présenté aux familles et à leurs frères d’armes, leurs condoléances.

Je ne saurais mettre en doute la sincérité de ces condoléances, mais j’ai tendance à voir en elles un exercice convenu, resservi dans chacune de ces tristes circonstances, et qui n’empêchera pas, hélas ! qu’il y ait demain d’autres morts.

Nos soldats sont 4 000 au Sahel. Ils luttent de façon totalement inégale, sur un territoire grand comme l’Europe, contre des terroristes qui sont dans l’immensité du désert comme des poissons dans l’eau, et contre lesquels nous faisons peu de poids.

Comme beaucoup de Français, je me demande si cette opération Barkhane est justifiée. Officiellement «  la stratégie sahélienne de la France vise à ce que les Etats partenaires acquièrent la capacité d’assurer leur sécurité de façon autonome » (source : Etat-major des Armées – Ministère de la Défense). En réalité je suis tenté de croire que cette opération est totalement inutile et injustifiée.

Nous sommes dans l’incapacité de ramener la paix sur ces immenses territoires. Nos hommes y connaissent des conditions d’existence terriblement difficiles, éprouvantes pour leur santé, y laissent parfois leur vie, comme dans le cas présent, et disposent d’un matériel obsolète. Ils seraient sans doute plus utiles en métropole pour lutter contre les menaces permanentes du terrorisme ou garder nos frontières. Et je ne parle pas des fonds considérables que nous engloutissons dans cette opération.

Je ne sais ce qui motive notre gouvernement.

Mais je sais que ce soir deux familles et des frères d’armes pleurent deux des leurs. Je pleure avec eux.

Ils s’appelaient Thomas, Elodie, Guillaume, etc.

Ils s’appelaient Thomas, Elodie, Nicolas, Guillaume, Alban, Elsa, Patricia, Fabrice, Grégory, Matthieu, Pierre, Cédric, Marie, Quentin, Hélène, David, Aurélie, Manu, Valentin, Lola, Patricia, Hugo, Valérie, Anna, Véronique, Guillaume, Victor, Halima, Houda, Asta, et tous les autres…

Ils étaient venus assister à un concert de rock, fêter un anniversaire à la terrasse d’un café, boire un verre avec quelques amis, etc.

Ils étaient fonctionnaires, étudiants, musiciens, artistes, avocats, etc.

Ils avaient vingt, trente, quarante ans et plus.

Ils aimaient la vie. Ne souhaitaient que vivre en paix.

Et voici que la mort les a fauchés ce vendredi 13 novembre. La mort plus odieuse, la plus abominable qui soit. Une mort que rien ne pourra jamais justifier, fruit d’une haine stérile et d’un mépris de la vie que tous nous condamnons.

Et ils laissent dans les larmes qui un mari, qui une épouse, qui un frère, qui une sœur, qui un ami ou amie, et qui sais-je ? Et ils laissent des enfants à l’aube d’une vie, privés à jamais d’un père, d’une mère !

Ô l’injustice qui frappe tous ces innocents ! Ô la stupidité de tous ces terroristes qui sèment la mort, le sang et les larmes, et sont incapables de se laisser attendrir par le visage d’une jeune fille au printemps de la vie, ou d’un jeune homme fêtant ses vingt ans ! Se sont-ils jamais laissé attendrir par l’amour d’une mère pour son enfant ?…

Ils tuent, tuent et tuent encore, de sang-froid, sans état d’âme, comme on tire sur des cibles dans une fête foraine…

Des heures et des heures – nuits et jours d’horreurs ! – des familles, des proches, cherchent en vain à savoir si tel ou tel est encore en vie. Ils téléphonent ici et là. Appels désespérés dans la nuit.

Puis la nouvelle tant redoutée tombe. Apportée par un proche, par la presse, par la TV ou autre. Un tel est mort. Larmes. Pleurs. Indicible souffrance qui accompagne la perte de tout être aimé.

Ou alors, miracle ! nouvelle inespérée après des heures d’angoisse : un tel est vivant. Blessé mais pas gravement. JOIE ! JOIE à nulle autre pareille ! MERCI mon Dieu !

Tristesse. Désespoir. Incompréhension devant tout ce carnage, tout ce massacre, en cette nuit d’un automne si beau, si doux !

Pourquoi ? Oui, pourquoi tant de haine ? Pourquoi tout ce sang innocent répandu ?…

Puissions-nous cependant, malgré notre désir légitime de vengeance, ne pas céder à la stérilité de la haine !

Refusons également de nous plier devant ces terroristes sans âme. Restons debout. Unis dans le malheur et la souffrance.

Et gardons au fond de notre cœur tous les souvenirs des moments heureux partagés avec ceux que la mort vient de faucher.

Tentative d’attentat dans le TGV Amsterdam-Paris…

Une semaine après l’attentat déjoué du 21 août, dans le train Thalys reliant Amsterdam à Paris, des journalistes de France 2 ont demandé à des passagers empruntant la même rame, ce qu’ils feraient en pareille situation.

Tous, sans exception, ont répondu qu’ils se seraient jetés contre le terroriste !

Quelle prétention ! Quel mensonge !

N’est pas héros qui veut.

Le terroriste a pu être désarmé grâce à un heureux concours de circonstances, et à la présence et au courage de quelques passagers.

Sans la présence d’un jeune et courageux Français qui se trouvait à la porte des toilettes quand le terroriste en est sorti et qui l’a immobilisé pendant quinze secondes, et sans le courage de deux militaires américains qui sont venus lui prêter main forte, aidé ensuite d’un ami américain, puis d’autres voyageurs, on aurait assister à un carnage.

Les autres passagers n’auraient rien pu faire. Ils auraient été immobilisés à leur place, auraient essayé de se coucher devant leur siège, et auraient été immanquablement blessés ou tués.

Pour neutraliser un terroriste entraîné au combat, seule la force et l’entraînement de militaires pouvaient réussir.

Il est donc bien prétentieux de la part de ces voyageurs de la semaine suivante, de soutenir qu’ils auraient désarmé le terroriste !

Je regrette souvent la médiocrité des personnes qui reçoivent la Légion d’honneur et trouve que cette décoration est bien souvent galvaudée. Dans le cas présent, je me suis réjoui de son attribution à quatre des « héros » – le terme est bien mérité – qui ont risqué leur vie pour sauver celle de tous les voyageurs de ce TGV.

Hommage au major Franck Bouzet

Une cérémonie aux Invalides. Une autre à Varces, siège du 7ème Bataillon de Chasseurs Alpins et, l’actualité chassant l’actualité, le Major Franck Bouzet, 88ème soldat français tué en Afghanistan, sera vite oublié des médias, de même que le soldat infirmier Olivier de Vergnette de Lamotte blessé en lui portant secours.

Resteront cependant la peine et les larmes d’une veuve et de trois orphelins, et de tous ses frères d’armes, en France et sur tous les théâtres d’opérations du monde.

Une question m’oppresse : pour quoi, pour qui cet homme est-il mort ?

Cette guerre d’Afghanistan qui apporte chaque semaine – chaque jour ? – son lot de blessés, de morts, d’attentats, d’horreurs est pour beaucoup lointaine, inutile et perdue d’avance. Alors pourquoi donner sa vie là-bas ?

En s’engageant dans l’armée comme simple soldat, en 1984, Franck Bouzet savait que le soldat a le redoutable et terrible pouvoir de donner la mort, et le risque aussi grand de la recevoir. Cela au nom de valeurs supérieures telles que la Liberté, la Paix, la Fraternité.

Franck Bouzet ne se battait pas en Afghanistan pour asservir un peuple, pour imposer une domination, mais pour le libérer.

Nous le savons tous, les Talibans veulent imposer aux Afghans et aux Afghanes une véritable dictature. Leur imposer l’obscure et inhumaine charia avec ses voiles, ses burqas, l’oppression des femmes, la lapidation de la femme adultère, etc.

C’est contre tout cela que l’adjudant-chef France Bouzet se battait.

Il est mort par fidélité à un devoir supérieur qui dépassait sa propre vie.

Je sais que l’Honneur n’est plus guère prisé de nos jours. J’affirme cependant qu’il est mort dans l’Honneur, pour l’Honneur, et pour la France.

« L’Honneur est la colonne vertébrale de nos armées, le pilier indispensable qui les tient droites et dignes. Une armée sans honneur n’est rien de plus qu’une milice, une bande de terroristes sans foi ni loi. » (Général Henri Bentégeat – Aimer l’Armée – 2012)

« Honneur et Patrie », tels sont les deux mots inscrits en lettres d’or sur nos drapeaux, sur ces drapeaux qui ont accompagné les derniers hommages rendu à ce major à titre posthume. Quelle fierté pour tous les siens, par delà la cruauté de ce deuil !

D’aucuns diront que les 88 militaires français qui sont tombés en Afghanistan sont morts pour rien, nos troupes quittant ce pays sans que la paix y règne. Rien n’est plus faux. Leur sacrifice fait la fierté de la France et des soldats afghans qui luttent eux aussi, héroïquement pour la Paix dans leur pays. Leur sang versé trace un chemin, une trajectoire et indique une marche à suivre.

 

Syrie : ne pas désespérer !

Mes fidèles lecteurs s’étonneront peut-être que je n’aie jamais parlé de la Syrie dans mes chroniques. Ce silence est loin d’être indifférence devant une guerre qui a fait plus de vingt mille mort en un peu plus d’un an, devant la barbarie sans nom d’odieux criminels qui tuent, violent, torturent hommes, femmes, enfants.

Mon silence est celui de la colère rentrée contre l’impuissance des Nations Unies à ramener la paix sur cette terre de souffrances.

Mon silence est celui d’innombrables hommes de bonne volonté à travers le monde glacés par l’horreur des crimes quotidiens au point d’en perdre la parole, et en rage de ne rien pouvoir faire pour y mettre un terme.

La vérité, c’est que tout le monde est dépassé par la situation, à l’exception des marchands d’armes qui s’enrichissent sans état d’âme, et des fanatiques qui espèrent à la faveur des événements prendre le pouvoir et remplacer une dictature par une autre, et de victimes devenir bourreaux.

La vérité, c’est qu’on ne peut ramener la paix et la démocratie en Syrie en fournissant des armes à l’ASL (Armée Syrienne Libre). Le risque est trop grand de les voir tomber entre les mains de terroristes qui s’en serviront demain contre les démocraties qui les leur auront fournies. Et on paye aujourd’hui, en Afghanistan, l’erreur d’avoir armé, hier, les Talibans contre les Russes.

Alors que faire ? Doit-on accepter d’assister impuissant au massacre d’un peuple ?

Pour le croyant, il reste la prière. Et pour celui qui ne croit pas, il reste la force de la pensée compatissante. Et pour tous, il reste l’Espérance.

Ce drame qui se déroule en direct, sous nos yeux, ne doit pas nous faire désespérer de l’Homme. Les nazis, dans la haine et la barbarie de leurs camps « Nuit et brouillard », n’ont pas réussi à étouffer les flammes de la Résistance, de la Liberté et de l’Amour. C’est toujours elles qui l’emportent et l’emporteront. Mais au prix de combien de sang ? De combien de souffrances ?

Quoi qu’il arrive, la victime reste et restera toujours supérieure au bourreau.

Je voudrais dire, pour finir, toute mon admiration pour ces journalistes – hommes et femmes – qui risquent chaque jour leur vie – et parfois la laissent – pour témoigner des tragédies que vivent les victimes de la guerre. Leur témoignage est précieux. Grâce à eux, nous ne pourrons pas dire le jour où cette guerre prendra fin : « Nous ne savions pas », comme le monde, en 1945, en découvrant les camps de concentration et les chambres à gaz.